Dans ce livre de conversations sur la vieillesse, Lucile, 80 ans, se souvient. Après la mort de son mari, elle a été placée dans une maison de retraite et, depuis, ne cesse de se débattre pour en sortir. Car, si le personnel médical considère qu'elle n'est plus en état de vivre chez elle, Lucile, elle, est persuadée du contraire. Et Lucile se rebelle : contre le corps médical, contre son propre corps qui ne la suit plus tout à fait, contre la société qui assigne une place particulière à ceux qu'on n'ose plus nommer vieux.
« D 'abordje ne suis pas une petite vieille. (...) La vieillesse a le dos voûté, des mains flétries. Les maux pèsent sur elle. (...). Elle bégaye, rabâche, oh ! se plaint (...) Ou se tait. Complètement silencieuse. Insupportable. Les Papys et les Mammys en sucre candi ? Entourés de beaux petits-enfants, ça c 'est la publicité à la télévision. Entre les deux ? La vieillesse grise, qui geint un peu, pleure un peu, soupire un peu, remâche un peu. Rien que du tout gris. Non je ne ressemble à aucune de ces trois vieillesses-là. À la vieillesse, je n'irai pas : je me retourne vers ma jeunesse. »
Comme Lucile, ce livre s'égare, fait des va-et-vient entre passé et présent. Le voyage est parfois lourd, gris, il serre le coeur. Mais il est parsemé d'élans, d'humour, d'émerveillements. L'enfance et la grande vieillesse se rejoignent, la méditation sur le temps qui passe et la mort qui s'annonce a des accents élégiaques.
« Nous savons que notre temps est compté, avec la mathématique implacable de l'existence. Nous avons vu, souvent d'un coup, imprévisiblement, s'effondrer notre corps, telles les falaises de glace dans les mers polaires. Notre corps s'effondre en silence, petit à petit, ou parfois, d'un coup, et la chute est d'autant plus brutale.
Alors, profitons de ce qu'il nous cède encore, en mêlant à nos aspirations le regret de n'avoir pas su apprécier, pleinement, suffisamment, les joies que ce corps nous donnait quand il était encore temps : la simple joie de marcher allègrement, sans canne, portés par l'air vif d'un matin de printemps ; celle d'entendre la musique aérienne des cloches dans un ciel pur, un midi d'été. »
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