Les rapports entre littérature et peinture ne cessent de soulever
un foisonnement d'interrogations. Et sans doute n'aura-t-on jamais fini
d'éclairer la diversité des liaisons qui s'opèrent à l'horizon de ces deux arts.
C'est un fait que l'histoire de la peinture en Occident s'est largement construite
en rapport avec la littérature. L'écriture même n'échappe pas à un traitement
pictural : des inscriptions placées dans les fonds des tableaux, au Moyen Âge
comme à la Renaissance, jusqu'aux graphismes parfois sauvages (Basquiat)
ou savamment contrôlés (Pierre Alechinsky) de peintres contemporains,
la lettre écrite, inscrite sur le tableau, devient aliment de la création plastique.
Non pour confondre littérature et peinture, mais bien plutôt pour aviver
leurs différences en faisant valoir leurs séductions réciproques.
Du côté de la littérature, la perspective qu'offre la peinture
est non seulement pour les écrivains un puissant aliment créateur,
mais aussi un stimulant théorique particulièrement fécond.
Les textes réunis dans ce dossier d'Europe permettent de nourrir
une réflexion aux multiples facettes. On pourra, chemin faisant, mesurer
combien les perspectives changent d'une époque à l'autre :
de la pratique médiévale de l'enluminure à la fascination picturale
des écrivains du XVIIIe siècle, puis du Romantisme à la période contemporaine,
l'horizon se déplace, et les liaisons entre littérature et peinture se transforment.
On verra aussi à quel point cette réflexion sollicite tous les paramètres
de la pratique littéraire : données historiques, questions esthétiques,
pratiques d'écriture, enjeux personnels ou collectifs se croisent
et se modifient comme en autant d'anamorphoses.
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