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Pourquoi « Les Points de repère » ? Ce titre s’explique peu à peu, à mesure qu’on s’enfonce dans ce roman. Il faut savoir qu’une jeune fille est aimée de quatre hommes fort différents et qui se connaissent : un Noir, un aveugle, celui qui le guide et un adolescent. Les décors : une plage, deux villes, un café, une boîte de nuit. Les personnages traversent ces lieux pendant quelques heures, une semaine, le temps de révéler leur vérité singulière et de reprendre leur place dans le ballet particulier qu’ils dessinent. Ils sont riches, occupés presque seulement d’eux-mêmes. Le drame hésite d’abord, il va de l’un à l’autre. Le groupe bien soudé lui oppose une fin de non-recevoir. De là, ce début lent et logique, uni, où il semble que rien ne va se passer. Et puis, voici l’accident, la mort, qui arrache des masques qui tenaient par habitude. Ce qui est nouveau, c’est l’expression. Je l’avoue, elle m’a d’abord déconcerté. Je percevais bien que les mots, les phrases, le rythme obéissaient à une intention, qu’ils étaient en quelque sorte doués d’une volonté de briser en moi des habitudes de langage pour que je me conforme à une autre manière de dire. Et puis tout à coup, je me suis souvenu que Louis-Antoine Prat — tout comme un de ses personnages, Art, le Noir — est batteur de jazz. J’en suis persuadé, il a tenté d’introduire dans son écriture certaines caractéristiques du jazz. De brusques ruptures du temps intérieur, propres à chacun des personnages, semblent les enfermer dans leur solitude. En fait, avec des moyens différents, leur timbre particulier, ils sont tous lancés dans le concert d’une aventure commune. On dirait d’une « jam session ». Ce roman ne se lit pas seulement avec les yeux. Il y faut aussi de l’oreille.