Comment la Vérité se communique-t-elle à nous ? C'est à cette question que
s'efforce de répondre cet ouvrage, à travers l'examen de trois philosophies
pour lesquelles le rapport de la subjectivité à la vérité constitue le coeur même
du questionnement philosophique. Selon la première option, celle choisie par
Hegel, la vérité est inséparable du mouvement par lequel elle se manifeste
comme telle, en invitant le sujet réfléchissant à s'effacer derrière cette auto-exposition
objective pleinement transparente pour le penseur dont la spéculation
réfléchit la dialectique interne. Contre cette tentative, qui prétend faire abstraction
de la subjectivité du penseur, Kierkegaard réaffirme l'irréductibilité de l'existence
au concept, et montre la nécessité d'un engagement personnel du sujet dans la
recherche du vrai - une vérité qu'il ne doit pas simplement s'approprier, mais
dont il a aussi à témoigner, en transformant sa propre existence d'après elle. Cette
réhabilitation de l'existence ouvre la voie à une véritable herméneutique des
représentations religieuses, le christianisme étant la religion où la vérité se
présente «en chair et en os», le message ne se distinguant plus de l'existence
du messager qui manifeste au monde cette vérité. Mais cela ne signifie pas
que la vérité en deviendrait plus «évidente» pour autant : bien au contraire,
Heidegger montre que la vérité, pensée comme dévoilement, est inséparable d'un
«voilement» qui en conditionne l'avènement, comme si le «mystère» qu'elle
abrite en son coeur ne pouvait se dire et se communiquer que sur le mode,
fulgurant, d'une révélation qui se dérobe à toute «captation» par une pensée
qui voudrait en être la mesure. L'OEuvre d'art, comprise comme institution de
la Vérité, se présente cependant comme le lieu à partir duquel peut s'éclaircir
la vérité de l'être, dont la beauté, en son rayonnement lumineux, est la plus
éclatante manifestation.
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