En 1999, trois ans après la mort de ma mère, je reçois un
coup de fil d'un inconnu. L'homme travaille au musée Beaubourg
et s'occupe de la gestion des collections. Il m'apprend l'existence
d'un tableau volé par les nazis à mes grands-parents et m'annonce
qu'il est question de me le restituer. J'ai tout de suite la chair de
poule. C'est, me dit-il, un tableau de Jacques Mauny, La Plage de
Trouville. Je possède deux autres Mauny, ai-je alors murmuré. Je
comprends que l'Histoire m'a rattrapée et en même temps je ne
comprends rien de ce qui m'arrive. Cet homme me suggère de
fouiller dans les papiers familiaux pour trouver des traces de cette
oeuvre. Je n'ai pas le droit de me dérober, mais ça tombe très mal.
Ce passé me pèse. Je lui en veux. J'ai profité du décès de ma mère
pour lui tourner le dos.
Nous prenons rendez-vous et échangeons nos informations.
La Plage de Trouville a été repéré chez mon grand-père en 1930.
Les Allemands l'ont pris en 1942. Et c'est à moi, me dit l'homme,
d'apporter la preuve de l'appartenance de ce tableau à ma famille
jusqu'à la seconde date. Je reste sans voix. Tous les témoins sont
morts. Aucune photo. Tout a disparu de cette époque.
La situation vient de se renverser. Je suis devenue une requérante
qui va harceler l'État français pour récupérer ce bien.
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