L'auteur de ce petit livre n'entend aucunement proposer une
nouvelle «lecture» d'un des plus grands chefs-d'oeuvre
du théâtre comique ni essayer de prouver que tous ceux qu'il a
fait rire depuis plus de trois siècles ont eu tort de rire ou auraient
dû rire pour de toutes autres raisons que celles qui les ont fait rire.
Il laisse cette absurde et outrecuidante prétention à un Charles
Mauron et à tous les metteurs en scène modernes qui, de Roger
Planchon à Jacques Lasalle, en passant par Antoine Vitez et Jean-Paul
Roussillon, lui ont emprunté l'idée, pourtant sans cesse
contredite par le texte de Molière, que l'emprise de Tartuffe sur
Orgon s'expliquait par la séduction physique.
Outre qu'elle est totalement arbitraire, cette «relecture»
homosexuelle du Tartuffe tend à lui faire perdre l'essentiel de sa
force satirique et comique, en reléguant au second plan les véritables
ressorts de la pièce qui sont, de toute évidence, l'hypocrisie
de Tartuffe et la crédulité d'Orgon. Elle ne peut qu'affaiblir la
portée d'une pièce clairement dirigée contre le rigorisme et l'intégrisme,
sinon contre la religion elle-même. Ainsi, sous prétexte
de la rendre plus actuelle, on s'emploie à gommer ce qui fait, au
contraire, que la pièce n'a jamais peut-être été aussi actuelle,
aujourd'hui où la crédulité, sous toutes ses formes (de l'astrologie,
jusqu'à la psychanalyse, en passant par la parapsychologie),
semble n'avoir jamais été si grande, et où l'on assiste à une dangereuse
montée des intégrismes.
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