Il est dix neuf heures trente. Deux tombereaux montent la rue du Rocher en direction du cimetière des Errancis, près de la barrière de Monceaux. Il est tard, on jette pêle-mêle dans la fosse les corps des suppliciés du jour. Parmi eux, Maximilien Robespierre et Louis-Antoine Saint-Just, né à Decize il y a vingt-six ans. Nous sommes le 10 Thermidor de l’An II. Ce jeune homme que rien ne destinait à participer à l’aventure révolutionnaire était mort sans pouvoir prononcer son dernier discours. Celui qui déclarait à la tribune de l’assemblée que « la confiance n’a plus de prix lorsqu’on la partage avec des hommes corrompus », ou encore « Osez ! ce mot renferme toute la politique de notre révolution », n’aura été député que vingt-deux mois et n’aura pu mettre en pratique la constitution de 1793 dont il fut l’un des maîtres penseurs. Quelles purent être les dernières heures, les ultimes pensées de Saint-Just, homme d’action et penseur d’actes, alors qu’ils se savait condamné ?
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