
« Aucun peintre sans exception, depuis Michel-Ange, n'avait
été appelé à sentir et à rendre le genre terrible d'une manière
plus puissante que feu Géricault. » C'est ainsi que le comte de
Forbin défendait en 1824 Le Radeau de la Méduse, dont plusieurs
malentendus avaient marqué la réception. Aucun peintre
depuis Michel-Ange n'avait réinventé avec tant d'audace les
exigences d'un art sublime, donnant à la peinture française
son tableau le plus célèbre, au romantisme son chef-d'oeuvre,
et à la modernité son premier mythe de la catastrophe. Mais
dans Le Radeau de la Méduse Géricault fournit de l'expérience
du sublime une version si différente de toutes celles qui l'ont
précédée, qu'il n'y a pas un concept dans la théorie esthétique
pour la décrire adéquatement. Les souffrances que Géricault a
peintes n'attestent aucun arrière-monde, pourtant leur déréliction
n'empêche pas que sa peinture y trouve un absolu. Le Radeau
de la Méduse participe d'un lieu que nous avons en nous - d'un
lieu commun - dans lequel il nous est possible de nous rencontrer.
« Nous sommes, disait Victor Hugo, sur le radeau de la
Méduse. Et la nuit tombe. »
We publiceren alleen reviews die voldoen aan de voorwaarden voor reviews. Bekijk onze voorwaarden voor reviews.