
Dès son premier recueil de Canções (1921, repris et augmenté en 1922), le poète portugais Antonio Botto (1897-1959) fait une entrée fracassante en littérature avec vingt-cinq chansons d'amour dont la plupart sont ouvertement dédiées à des hommes, chansons ardentes et mélancoliques qu'on imagine chantées dans des cabarets et qui ont inspiré de grandes voix du fado comme Misia et Mariza. Botto se vit et se dit en adolescent éperdu, en amant queer qui ne chercherait pas seulement le plaisir dans le refuge de son alcôve, mais à s'affranchir de la hantise du temps perdu et du temps qui passe, de la solitude, du froid, de l'automne, de la nuit et de la mort.
Fernando Pessoa (1888-1935) a publié en 1922 ce recueil dans son éphémère maison d'édition - Editora Olisipo -. Pour aider Botto à se faire reconnaître, à l'étranger mais aussi dans un Portugal qui le condamnait moralement, il a traduit en anglais en 1933 un florilège de ses Chansons sous le titre Songs. On trouvera dans le présent volume les vingt chansons qu'il a retenues de ce premier recueil. EO a tenu à en donner également la traduction française pour souligner le travail d'arrangeur de Pessoa, privilégiant la musique, esthétisant le cri de passion plus brut, plus populaire de l'original.
Où entend-on le mieux la saudade, ce manque qui devient chant, cette « épine amère et douce », selon les mots d'Amalia Rodrigues ?
La pénombre gagne
L'alcôve
Où j'attends
Ta venue...
Ne tarde pas, ô mon amour absent !
Le jour fuit. La nuit approche...
Et les roses qui fanent
Tombent en murmurant :
- Nous voulons qu'il nous piétine
Mais quand viendra-t-il, quand ?
- Avoir le vin pour amant
Et la mort pour compagne !
Dire à l'amour qu'il vienne
Plus tard, demain, un de ces jours,
- C'est tuer
Ce pour quoi nous vivons ;
C'est donner à la mort la toile avancée
Qu'elle
N'a pas gagnée -, c'est comme mourir
Avec la plus triste pensée !
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