Contrafacta, fricassées, timbres ou reprises, du Moyen Âge
au XXe siècle, la chanson a toujours goûté le plaisir de la
création seconde, pour mieux enchanter l'auditeur. Mais
sont-ce seulement quelques récréations que ces compositions
entées ? En montrant comment elles sont éclairées
par et éclairent à leur tour la poétique de l'intertextualité,
l'objet de cet ouvrage est de montrer la portée re-créatrice
de ces oeuvres entées. Ce parcours à travers les âges
et les domaines linguistiques expose à la fois la vitalité des
recherches cantologiques actuelles et celles des travaux sur
la théorie de l'intertexte.
Comme espace du topos et de la parole mémorielle, la
chanson est, entre autres manifestations de la poésie orale,
particulièrement perméable aux procédés d'emprunt, réemplois
et réfections diverses qui caractérisent la poétique de
l'intertextualité. Elle l'est même doublement : comme oeuvre,
elle est formellement fondée sur les figures de récurrence ;
comme espace générique, elle est le lieu privilégié de la tradition,
comprise comme mode de transmission d'un message
culturel dans un temps donné.
Au-delà du seul texte, le tissage sémiologique singulier du
genre chanson fonctionne comme réceptacle particulier du
discours autre et du discours de l'Autre : non seulement la
chanson cite, réécrit, voire plagie textes et musiques, mais,
chaque performance étant une autre oeuvre, elle investit le
champ de la recréation par le jeu des réinterprétations. On
a voulu questionner ici l'articulation entre ces présences
«autres» et la corporéité de la voix transmise qui reste la
visée du discours chansonnier.
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