Voilà un an que le maître de haikai Bashô (1644-1694) a terminé sa grande boude dans le Nord-Est, à la relation de laquelle il travaille et qui donnera L'Étroit Chemin du fond. Il n'est pas retourné à Edo (actud Tôkyô) et villégiature, ici et là, entre Kyôto et la rive sud de l'immense lac Biwa. C'est face à ce dernier panorama qu'en mai 1690, un disdple met à sa disposition l'Ermitage-d'Illusion, sur les hauteurs boisées, auprès d'un petit sanctuaire et d'une source, parmi les vocalises des oiseaux. Le poète y séjournera trois mois.
Le lieu l'enchante et suscite en lui impressions et méditations qu'il jette sur le papier en ce moment particulier de sa vie, quatre ans avant sa mort qu'il sent peut-être s'approcher. Dans l'année qui suivra, il aurait rédigé jusqu'à huit variantes de ce texte en prose, très élaboré, dont il veut faire un modèle de haibun (prose d'esprit haikai, c'est-à-dire lyrique et réaliste). Nous donnons la version publiée par l'auteur, mais nous l'accompagnons des deux autres la précédant qui ont été découvertes avec deux fragments initiaux. L'ensemble se complète parfaitement Nous fournissons encore la postface où un disdple caractérise l'art du paysage dans ces Notes de l'Ermitage-d'Illusion.
Véritable journal de séjour, les Notes de l'Ermitage-d'Illusion constituent un superbe texte, aussi ample que dense et profond, devenu un classique des lettres japonaises. Bashô évoque ses pérégrinations, les sites traversés, sa fatigue, son bonheur de se reposer en contemplant, depuis son « fauteuil du singe », le grand lac, en bavardant avec quelques rares visiteurs du cru. Il fait le point également sur sa vie, peut-être ratée, se questionne sur la fatalité de sa passion pour la poésie qui ne lui a laissé entreprendre rien d'autre, exprime ses doutes quant à ce qu'il a composé. L'ermitage, le voyage, l'écriture, tout n'est finalement qu'« illusion »... C'est la méditation bouddhiste et taoïste d'un homme que l'on devine malade, tentant de se fondre avec le « principe créateur de l'univers » (zôka), interrogeant avec sérénité et confiance, à travers « l'ombre de son ombre », le « Vide originel ».
Dans notre introduction, après nous être attaché à montrer l'influence sur Bashô des Notes de ma cabane de moine de Kamo no Chômei (1155 ? -1216), nous avons analysé de près l'élaboration du texte, de brouillons en variantes, et dégagé ses grandes problématiques, pour terminer par une comparaison assez poussée avec Thoreau, Rousseau et Pétrarque.
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