Les premières formes de décentralisation de l’action sociale, sur le terrain de la prise en charge de l’enfance inadaptée, remontent au régime de Vichy. Créées à partir de 1943 et maintenues à la Libération, des associations régionales pour la sauvegarde de l’enfance et l’adolescence (ARSEA) au statut ambigu - ni tout à fait publiques ni tout à fait privées - vont être chargées de gérer et de fédérer tout un ensemble protéiforme d’associations et d’œuvres peu habituées à se concerter et à s’entendre dicter ce qu’elles doivent faire. La Bretagne est à cet égard particulièrement représentative de l’essor d’une initiative privée aux visages multiples et des stratégies développées par les acteurs, œuvres et associations pour déjouer toute tentative de coordination, qui se voudrait trop autoritaire. La Fédération bretonne de Sauvegarde réussira cependant à créer un réseau d’adhérents et de fidèles qui se hisseront aux avant-postes, en France, de la promotion de l’éducation spécialisée. Pour autant, au début des années 1960, l’état cherche à diminuer l’influence de ces personnalités qui entendent souvent donner le la en matière de politique en faveur des jeunes en difficulté, devenant parfois juges et parties. Les ARSEA se transforment alors en CREAI (centres régionaux pour l’enfance et l’adolescence inadaptées), dont le rôle va se réduire peu à peu à la portion congrue. Des années 1970 au milieu des années 1980, ce livre suit pas à pas l’épopée de cette décentralisation avant la lettre et, ce faisant, permet de saisir bien des enjeux qui aujourd’hui encore traversent le travail social.
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