La prodigieuse poussière d'îles perdues dans l'Océan Indien - infimes lèches de terre ancrées
dans une vaste tache indigo, un grand pan de bleu mascarin - est une suite d'espaces, riche et
complexe, où depuis plus de trois siècles se sont développées puis affirmées des littératures en
langue française et en créole, encore mal connues et reconnues. Pourtant, pendant longtemps, l'île
de La Réunion - l'ancienne Bourbon - a mérité le titre d'Île des poètes. Et si l'on en croit le Prix
Nobel Jean-Marie Gustave Le Clézio, Maurice - l'ancienne île de France - est devenue un
«laboratoire verbal». Le présent volume revient sur quelques moments marquants d'une
production romanesque et poétique qui surprendra le lecteur par sa variété et son originalité.
Une large quinzaine d'essais retrace, en une suite continue, une aventure qui commence à
l'aube du Romantisme pour se terminer avec des oeuvres et des noms qui, à des titres divers,
font partie de notre contemporanéité : on citera, entre autres, Alain Lorraine, Anne Cheynet,
Axel Gauvin, Carpanin Marimoutou, Natacha Appanah. L'étude de diverses francophonies (on
insistera sur le pluriel) est abordée comme celle de processus interculturels, de dialogues des
cultures au sein desquels s'écrivent les rapports entre histoire et imaginaire, entre langue
française et langues créoles, entre écriture et oralité. On retrouvera les multiples traces laissées
par des modèles européens, du roman feuilleton à la littérature militante, engagée et l'on pourra
à loisir suivre l'étonnante permanence d'un imaginaire qui s'exprime à travers quelques thèmes
majeurs : le marronnage, l'enfance perdue, l'exil, la recherche d'une certaine dignité humaine.
Aussi, au-delà de combats multiples qui redonnent à l'homme opprimé toute sa force et sa
grandeur, l'unité profonde de ce volume est à chercher dans une suite d'expériences d'ordre
existentiel, culturel ou politique, au sens large du mot, que nous livre, aujourd'hui et maintenant,
une voix romanesque ou une parole poétique qui allient témoignage et confession.
La lecture ici pratiquée comme une expérience poétique s'attache à la mise au jour de
principes selon lesquels le texte s'institue en forme singulière. On parlera d'une lecture créatrice
ou plutôt «recréante», un néologisme dont l'auteur de l'ouvrage assume la paternité. Loin de
vouloir identifier les premiers temps d'une création ou de saisir un hypothétique instant
créateur, il s'agit de prendre possession d'un espace d'invention verbale et faire en sorte que le
trajet de la lecture puisse retrouver un projet d'écriture.
We publiceren alleen reviews die voldoen aan de voorwaarden voor reviews. Bekijk onze voorwaarden voor reviews.