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L’amitié d’un très jeune garçon, puis d’un jeune homme, pour une dame, très belle certes, admirable interprète, et initiatrice pour lui de l’univers du lied, peut éveiller des soupçons, rappeler un thème déjà utilisé. Qu’on se rassure : “Je n’étais pas Harold, nous dit l’auteur. Marine n’était pas Maud.” Nom prédestiné s’il en fut. Liant cette trilogie essentielle, Mer Marine Musique, à l’unicité d’un lieu privilégié : propriété en gradins sur la rade de Toulon à la pointe du Cap Brun. Ce sont donc, de 1924 à 1937, sur ce Mont-du-Soleil propice aux enchantements, douze étés filés à la suite comme s’ils ne formaient qu’une seule et même saison. Point fixe de cette grande utopie estivale et axe de la métamorphose de l’enfant poussé à son insu vers l’âge d’homme. En quel autre lieu vaudrait-il la peine de vivre ? Entre la musique et la mer, un vieil harmonium et un canot, le garçon s’enferme dans cette vision. Pour Bourniquel, monde aussi clos que celui du Lac. En vérité, grande serre tropicale. Une telle halte ne saurait être définitive. La réponse se trouve dans un des lieder que chante Marine d’Autigny, ce poème de Mathilde Wesendonck mis en musique par Wagner, la Serre, et dans lequel s’annonce un des thèmes de Tristan : “... Nous vivons dans la lumière et la splendeur, mais notre patrie, notre demeure n’est pas d’ici.” Toute cette beauté mise en réserve ne peut indéfiniment débouter la réalité du temps, ses malédictions et ses appels. Du jardin enchanté il ne restera que le souvenir d’une voix, des images aussi indétachables que le retour de la vague. Chronologiquement, chez Camille Bourniquel, cette cité du soleil fait suite à la cité des ombres précédemment évoquée, mais sans en rejeter tout à fait les fascinations et les phantasmes.