Il n'est pas de langue plus énergique, plus colorée que
celle de ce monde souterrain qui, depuis l'origine des empires
à capitale, s'agite dans les caves, dans le troisième-dessous
des sociétés.
Chaque mot de ce langage est une image brutale, ingénieuse
ou terrible. Une culotte est une montante. En argot
on ne dort pas, on pionce. Remarquez avec quelle énergie ce
verbe exprime le sommeil particulier, la bête traquée, fatiguée,
défiante, appelée Voleur.
Tout est farouche dans cet idiome. Les syllabes qui commencent
ou qui finissent, les mots sont âpres et étonnent
singulièrement. Une femme est une largue. Et quelle poésie !
la paille est la plume de Beauce. Le mot minuit est rendu par
cette périphrase : douze plombes crossent ! Ça ne donne-t-il
pas le frisson ?
L'argot va toujours, d'ailleurs ! il suit la civilisation, il la
talonne, il s'enrichit d'expressions nouvelles à chaque nouvelle
invention. Les novateurs modernes écrivent des théories
pâteuses, filandreuses et nébuleuses, ou des romans philanthropiques
; mais le voleur pratique ! il est clair comme un
fait, il est logique comme un coup-de-poing. Et quel
style !...
Balzac
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