"J'ai longtemps pensé que l'Algérie n'était pas mon histoire. Je suis pourtant née à
Oran en 1959 et suis l'une de ces milliers d'enfants rapatriés en 1962. Comme beaucoup
de pieds-noirs, mes parents avaient tourné la page, ne vivaient pas dans la nostalgie,
mais je rejetais même le peu qu'ils disaient d'eux. On n'est pas pied-noir quand on a 17 ans.
"Et puis, il y a dix ans, je suis tombée sur un journal qui commémorait les 40 ans des
accords d'Évian, avec une photo en noir et blanc à la une : une petite fille, dans les
bras de son père, sur la passerelle d'un paquebot. Marseille, juillet 1962. Et j'ai pleuré,
toute seule, le journal entre les mains.
"Mais que savais-je de ce pays que plus personne chez moi ne semblait regretter ?
Je me suis donc lancée dans une sorte d'enquête, ou de quête, qui m'a menée jusqu'en
Algérie, pour essayer de reconstituer cette histoire à hauteur d'enfant. Voici le journal
de ce passé recomposé, d'une mémoire qui s'est cherché des souvenirs chez les miens
et les autres : Jacques Attali, Julien Dray, Mehdi Charef, un fils de colon, un jeune
engagé dans l'OAS, une victime d'attentat du FLN, une fille de harki, celle d'un
professeur communiste. Au final, ce puzzle m'a permis d'approcher ce qui "nous" est
arrivé." B. B.
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