A lire les guides de voyage, les Petits-Blancs confèrent à La Réunion une originalité
unique parmi les îles créoles. De fait, ils n'ont pas cessé d'intriguer les
voyageurs et d'attirer la sympathie des Français de métropole, émus par la pauvreté
d'une population que ses caractéristiques physiques semblaient programmer
pour un destin social plus favorable. Associés spontanément au peuplement des
«Hauts», ces versants des montagnes volcaniques qui confèrent à l'intérieur de
l'île une beauté sauvage, ils ont été l'objet d'une profusion de discours attendris
ou moqueurs. L'existence des Petits-Blancs comme composante de la population
réunionnaise a été ainsi promue curiosité locale à ne pas manquer.
Pourtant la réalité de l'existence d'un groupe particulier, désigné par le qualificatif
de Petits-Blancs, est aujourd'hui objet de contestations. Des chercheurs
se sont interrogés, il y a peu, sur la pertinence d'une appellation qui serait le
fruit d'une invention tardive de l'idéologie coloniale pour conférer à La
Réunion un label d'origine française. Les Petits-Blancs sont-ils donc l'invention
d'un discours colonial soucieux de légitimer le caractère français de l'île
et de conforter les liens avec la métropole ?
Face à ces questions légitimes, l'ouvrage d'Alexandre Bourquin constitue
une contribution essentielle. Il n'élude aucune difficulté, et d'abord celle de
définir et délimiter un groupe humain aux contours indécis. Il montre comment
le vocabulaire a longtemps hésité sur le terme à employer pour qualifier une
population libre, issue du peuplement européen et très vite métissée, mais attachée
à une origine blanche, c'est-à-dire libre, qui la distingue de l'affranchi. Ni
ethnie, ni classe sociale, les Petits-Blancs constituent un extraordinaire révélateur
des tensions et des impasses d'une société coloniale née du transfert de
diverses populations et fondée sur l'esclavage, puis l'engagisme.
We publiceren alleen reviews die voldoen aan de voorwaarden voor reviews. Bekijk onze voorwaarden voor reviews.