Georges Franju
L'image désincarnée
Le chef-d'oeuvre de Georges Franju, Les Yeux sans visage (1960), a inspiré un certain nombre de cinéastes, de John Woo (Volte/face, 1997) à Pedro Almodóvar (La Piel que habito, 2011). Contemporain de la Nouvelle Vague, Franju réalise un film intemporel, insolite au sein du septième art qui se renouvelle à cette époque mémorable. À partir d'une intrigue invraisemblable, il construit une histoire plausible, une horreur poétique qui se fonde sur un réalisme ordinaire, comme déjà avec son court-métrage non moins célèbre : Le Sang des bêtes (1949). Franju réussit à transposer l'invisibilité d'un monstre à l'écran, personnage central, dont on ne voit jamais le visage. Épigone de Frankenstein, le père de cette créature tente désespérément de combler son déficit d'image, d'accomplir une transfiguration miraculeuse comme Véronique imprimant la Sainte Face du Christ sur son voile, une transsubstantiation d'un visage profane en image désincarnée. De fait, la méthode d'analyse du film s'inspire du procès de représentation inauguré par le christianisme, procès dont la référence est l'image naturelle - le Christ - consubstantielle à Dieu son modèle infigurable, et qui s'est perpétué dans l'icône religieuse.
Cet ouvrage est publié avec le concours de l'unité de recherche Interactions culturelles et discursives de l'université de Tours.
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