Aucun d'entre eux n'aurait dû être là, pourtant ils étaient
neuf, chargés dans deux voitures, à se lancer sur les routes !
L'enfant avait sept ans. Dans le récit entrepris soixante-dix
ans plus tard il est nommé « votre grand-père ». Il semble que
l'auteur, au prétexte qu'il aurait déjà trop conjugué sa première
personne, ait voulu confier à une autre voix que la sienne le
soin de guider le lecteur entre les strates des mémoires. C'est
lui pourtant qui ouvre les papiers anciens de sa famille.
Est-ce alors un roman ? Sans doute, puisque des faits et des
gens qui furent bien réels y rejoignent le jeu de suppléer
aux lacunes du souvenir ou au manque de confidence - à
l'époque - des personnes tardivement convoquées. Réveiller
presque les pensées de chacune d'entre elles suppose de les
avoir suffisamment connues, comme l'ancien enfant, « votre
grand-père », l'affirme. Nul ne le contredira : toutes ces
figures qu'il pose debout sur l'incertaine prairie en 1940 sont
de longtemps disparues, sauf lui !
Le récit s'écrit donc à la dernière personne.
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