
Une charretée de bois ou de foin déposée sur la cour commune,
une fenêtre ouverte sans concertation, les poules du voisin qui
dévastent le jardin... voici que les femmes crient, que les hommes
se battent, que les injures fusent et que les procès pleuvent. Ces
affaires misérables - mais tellement importantes - ont rythmé la
vie quotidienne des cantons ruraux du XIXe siècle et inondé les
justices de paix. Les archives de cette juridiction de base, instituée
en 1790, sont pour l'historien d'une exceptionnelle richesse et
donnent à voir des tranches de vie saisissantes de proximité. Les
négliger revient à se condamner à ne rien comprendre au monde
rural qui a longtemps prédominé en France. Les acteurs ignorés de
notre histoire sont exhumés et retrouvent leurs voisins, leurs mots et
leurs colères ; ils ressuscitent dans l'épaisseur des travaux et des
jours, des inimitiés et des conflits ; à nouveau s'offre à eux le champ
des possibles tel qu'ils l'ont construit, utilisé avec plus ou moins de
pertinence et finalement abandonné. Les archives judiciaires
permettent, quand elles sont croisées avec les archives notariales, de
l'état civil, du cadastre et de l'enregistrement, de mettre à jour les
réseaux de solidarité et de clientèle et de mieux comprendre
comment «fonctionnent» hameaux et villages. L'observateur
attentif parviendra aussi à délimiter les «territoires du Moi» qu'on
ne franchit pas impunément et à définir les seuils du supportable
dans le cadre d'un regard croisé entre justice et justiciables.
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