Christine de Suède est l'un des personnages les plus surprenants
de tout le XVIIe siècle, qui n'en manque pas.
Reine à six ans, elle abdique à vingt-quatre, se convertit au
catholicisme, se fixe à Rome. Elle n'a cessé, en toutes circonstances,
dans sa vie trépidante de jeune reine puis de reine sans royaume,
puis dans son rôle de padrona di Roma vieillissante, de déconcerter
ses contemporains, puis les historiens, les romanciers et les
gens de théâtre. Elle parlait dix langues, s'habillait en homme et
disait ce qui lui passait par la tête. Elle a aimé tous les arts, mais la
musique plus que tout. Ouvrir la première salle d'opéra public
à Rome, demander à Corelli, à soixante ans, de lui donner des
leçons de violon, à Stradella de composer la musique d'un mini-opéra
sur un livret de sa main, faire venir Descartes à Stockholm
et lui faire écrire le scénario d'un ballet - qui a fait cela ?
Il a semblé à Philippe Beaussant que la musique était le plus
juste témoin de ce que fut cette femme étonnante : la succession
même des oeuvres qu'elle a aimées, qu'elle a voulues, constitue un
portrait en musique, plus vrai que tout ce qu'on a pu dire d'elle.
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