Saint-Simon a souligné le rôle décisif du rang dans l'architecture
nobiliaire de son temps. Même les normes artistiques obéissent
à ces règles sociales et hiérarchiques qui constituent un véritable
code : toute oeuvre d'art est au service d'un message politique, elle
est surveillée, évaluée et aussitôt critiquée si le commanditaire
franchit si peu que ce soit les limites dans lesquelles il est contraint.
Les Rohan-Soubise sont passés maîtres dans cet exercice délicat de
transgression, jouant de leur statut particulier de princes étrangers et
de diverses fonctions obtenues grâce à la faveur de Louis XIV et dont
la conservation dans le cadre familial pendant tout le XVIIIe siècle tient du grand
art. L'acquisition de l'ancien hôtel de Guise transformé en palais Soubise est la
plus remarquable expression de cette stratégie sociale. Mais toute grandeur est
vaine dans ces cercles les plus élevés de la noblesse si elle n'apparaît pas comme
l'expression de la magnanimité, à la fois grandeur d'âme et noblesse du coeur, qui
se traduit par la magnificence assimilée à la générosité, au faste et à la splendeur.
Ces questions sont au coeur de ce livre. La «pratique» des Soubise est
analysée dans une série d'études qui prolongent l'ouvrage paru en 2004 sur
Les hôtels de Soubise et de Rohan-Strasbourg en illustrant certains aspects de
ce mécénat princier. Le propos s'élargit ensuite avec plusieurs réflexions sur
l'architecture et la décoration civile et religieuse, en France et hors du royaume,
en Lorraine, dans l'Allemagne rhénane, en Franconie et à la cour de Vienne.
Les regards croisés des architectes Neumann et Boffrand, Schlaun, Cuvillies,
Pacassi, Valmagini et Lederer illustrent la complexité des influences stylistiques
dans une Europe des Lumières qui est loin d'être aussi uniformément française
que l'affirmait Louis Réau dans un livre célèbre.
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