La notion d'«énonciation éditoriale» est apparue dans les années
1990 à partir d'une réflexion interdisciplinaire impliquant l'histoire de
l'édition française, le concept d'image du texte et la critique génétique.
Elle est issue - entre autres exemples - de l'observation que Le Petit Poucet
de Perrault compte quatre paragraphes dans l'édition Barbin en 1697,
une centaine dans l'édition Hachette en 1905. Elle s'est développée dans
deux directions complémentaires : en amont de la remise du manuscrit par
l'auteur à l'éditeur, elle concerne l'anticipation de la publication au cours
de la mise en mots qui donne naissance au texte. En aval, elle concerne
la façon dont l'éditeur transforme le texte en livre en le corrigeant, en
l'abrégeant, en le mettant en scène par de multiples choix de fabrication.
Cependant, depuis les années 1980, le manuscrit saisi par l'auteur sur son
ordinateur incorpore la composition typographique du livre, de sorte que
c'est le texte de l'auteur, et non celui que l'imprimeur a recomposé, qui sert
de support au travail de l'éditeur. Le concept d'«énonciation éditoriale» en
est profondément changé. Parallèlement, le développement des nouvelles
technologies de l'information-communication a déplacé l'édition du papier
vers l'écran ; la production de certains genres de textes a été robotisée ;
les livres ont été transportés vers de nouveaux supports de lecture. On
parle d'éditique et d'éditorialisation. Parmi les questions que cela pose à
l'intelligence des textes, on se demande ici quelles nouvelles écritures sont
en train d'apparaître.
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