Ce livre a pour objet l'étude des conflits entre chrétiens et musulmans au
cours de trois décennies décisives pour l'Égypte moderne (1922-1952).
Durant cette période, les coptes renoncent à leur ambition de participer
aux côtés de leurs frères musulmans à la construction d'une Égypte
indépendante. Quant aux minorités chrétiennes étrangères, on les voit alors
quitter peu à peu ce pays dans lequel elles ne trouvent plus leur place.
Comment et pourquoi une telle évolution ?
L'abrogation du protectorat, proclamée par la Grande-Bretagne en
février 1922, et l'instauration d'une monarchie constitutionnelle n'ont pas
fait de l'Égypte un État pleinement indépendant. Les Britanniques restent
acteurs de la vie politique, les Européens contrôlent largement l'économie,
les étrangers et ex-sujets ottomans, protégés par les capitulations, jouissent
d'une totale autonomie, les missionnaires catholiques et protestants gèrent
en toute liberté leurs écoles et leurs hôpitaux.
Dès lors, une préoccupation constante des gouvernements égyptiens sous
la monarchie est la reconquête de la souveraineté de l'État et l'affirmation
de son identité arabe et islamique. Double objectif, dont la réalisation
s'opère progressivement par différents moyens : égyptianisation du
personnel dans la fonction publique et les multiples secteurs de l'activité
socio-économique, arabisation de l'administration et de l'enseignement,
centralisation des pouvoirs, islamisation de la société. Le dépouillement de
la documentation révèle que la dégradation de la situation des minorités
chrétiennes - marginalisation des coptes et érosion de l'autonomie de
toutes les communautés - a été la conséquence directe de mutations
sociopolitiques. Journaux, archives, autobiographies mettent en évidence
les secteurs où se nouent les conflits interreligieux et où s'amorcent les
transformations de l'époque nassérienne.
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