Le communisme français n'a pas été seulement celui des ouvriers. Dès
l'entre-deux-guerres, de nombreuses communes des campagnes ont dirigé
leurs suffrages vers le PCF, en contradiction avec l'image conservatrice qui colle
souvent aux paysans en matière politique. Cette implantation précoce ne s'est
pas démentie à la Libération, bien sûr en lien avec l'aura acquise par le parti
dans la Résistance. C'est ainsi que la Haute-Vienne, dont les campagnes sont
les dépositaires d'une tradition rouge et contestataire remontant au XIXe
siècle, sont devenues à la fin de la guerre et jusque dans les années 1980 un
véritable bastion communiste, malgré le poids considérable de l'autre parti de
gauche dans le département, la SFIO.
Cet ouvrage se propose de retracer l'historique de cette implantation au
cours d'une période charnière dans le monde rural : celle qui court de la
Libération à la fin des années 1960, alors que la civilisation paysanne est en
train de disparaître. Se dessine une manière d'être communiste à la campagne
fortement liée à une identité locale et donnant naissance à une culture
politique en apparence paradoxale, au croisement de l'idéologie, des
structures et des intérêts portés par le PCF d'une part, des représentations et
des revendications des paysans haut-viennois d'autre part. Ces derniers, dans
un département marqué par la petite propriété, ne souhaitent pas la
révolution prolétarienne ou la collectivisation des terres, mais la protection de
leur métier et de leur mode de vie, dont ils sentent bien toute la fragilité sous
les coups que leur portent l'essor du productivisme agricole et la dernière
vague de l'exode rural.
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