Le cinématographe de Robert Bresson se veut aussi différent du
cinéma que de la littérature dont pourtant il s'inspire largement. La
différence se situe au niveau du récit. Au cinéma, la caméra
enregistre des acteurs jouant dans un décor. Le cinéma met le récit
devant la caméra, il en fait l'avant du tournage : ce n'est là, pour
Bresson, que du théâtre photographié. Le cinématographe en
revanche est avant tout montage : c'est l'interprétation du
spectateur qui fait des images et des plans enchaînés un récit, en
quoi on reconnaîtra l'effet Koulechov. Le récit chez Bresson est
l'après de la vision et le dehors de l'image. De ce postulat, qui
définirait l'essence du cinéma, il tire une série de conséquences qui
vont constituer son cinématographe. Si c'est à l'endroit du
spectateur que se fait le récit, images et plans peuvent être libérés
de leur contenu narratif : ils sont dénarrativisés. Pour l'image et le
montage, c'est la fragmentation, la métonymie, l'asyndète ; pour
l'acteur, c'est sa transformation en «modèle». La dénarrativisation
permet ainsi à Bresson d'obtenir un double effet : en gommant le
récit, il ne reste que de l'insignifiant qui produira un effet de réel,
et de l'énigme, qui produira un effet de sublime.
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