
On ne saurait séparer La Nuit coutumière de Rumeurs du soir qui paraît en même temps. Ces deux livres d'Anne Walter - ils ne sont publiés en deux volumes que pour donner plus de résonance à chacun d'eux - sont composés l'un et l'autre, en effet, dans le mode de la musique de chambre, et les courtes nouvelles du premier livre, écrites allegro fugato, conduisent irrévocablement à l'andante sostenuto du roman. La fièvre et la puissance de ces deux textes viennent ainsi de l'exposition musicale d'événements d'apparence mineure auxquels l'inattendu confère soudain les dimensions de l'incomplétude charnelle ou du tragique.
On trouve ici et là, dans ces récits, de petites phrases qui pourraient fournir autant de clefs du royaume fascinant dont Anne Walter, depuis Monsieur R., se montre familière : "Où, dans notre vie, écrit-elle par exemple, se cache la vie ?" Car Anne Walter est de ces écrivains qui ne se sentent pas le droit de "décider" : elle livre à l'imagination des autres ce que la sienne lui fait entrevoir. Tout son art tient à la fois à cette discrétion indiscrète et à la manière dont, par les visions qui lui viennent, elle compromet son lecteur Ainsi, peu à peu, se constitue une oeuvre d'une originalité exemplaire.
Hubert Nyssen
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