Juno Moneta

Nos connaissances sur la déesse Juno Moneta, qui n'a aucune mythologie, comme c'est souvent le cas pour les divinités romaines, se limitent à quatre groupes restreints de données anciennes : données relatives à deux de ses temples, celui de la citadelle de Rome, censé avoir été bâti sur l'emplacement de la maison de Manlius Capitolinus, et celui de Signia (Segni) ; données historico-légendaires relatives au rôle joué par ses oies (?) lors de l'invasion des Gaulois (390 ou 387/6), rôle qu'une cérémonie annuelle est dite commémorer ; données relatives à la frappe de la monnaie, qui lui doit son nom, pour avoir été localisée à proximité de son temple de Rome (269). Les interprétations anciennes de son nom constituent une quatrième source de renseignements par les justifications historiques ou autres qui les accompagnent. C'est sur cet ensemble de données que se fondent les notices des ouvrages de référence, ainsi que les pages correspondantes des monographies consacrées à Junon. Certains auteurs accordent une importance particulière à l'indication d'un passage de l'Odyssée de Livius Andronicus qui l'identifie à Mnémosyne, que ce soit pour en faire une entité distincte ou pour y voir l'origine du personnage.

On laissera provisoirement de côté les données archéologiques et historico-légendaires qui seront reconsidérées dans la suite de cette étude à partir de l'hypothèse bâtie sur une interprétation nouvelle de son nom : Junon «au collier». Car cette interprétation oriente vers des parallèles extérieurs et permet d'établir un rapport entre la déesse et certaines formes préhistoriques de la monnaie. Ce rapport originel de la déesse à l'or prémonétaire en forme de colliers ou de torques éclaire d'un jour nouveau, à condition qu'une continuité soit mise en évidence, la localisation de l'atelier de la monnaie auprès de son temple, et un certain nombre de thèmes qui lui sont liés directement ou indirectement comme ceux de l'aurum matronarum et de l'aurum Gallicum, ainsi que la situation de ses temples les plus anciens sur les sommets ; peut-être aussi son identification (secondaire ?) à Juno Regina. Il donne également une signification aux liens qui ont été signalés antérieurement entre la déesse et la gens Manlia : non seulement avec les Manlii Capitolini, mais aussi avec les Manlii Torquati. Ce que nous savons de son culte (s'il s'agit bien de cela) oriente vers des représentations plus archaïques, plus proches aussi des parallèles extérieurs. L'étude se termine par une présentation chronologique des formes successives de la «déesse au collier».

Après avoir fait le tour des maigres données dont le latiniste dispose sur Juno Moneta, Latte, Römische Religionsgeschichte, p. 169, conclut : «il ne reste que l'indication tirée de son nom, dont la formation isolée apparaît ancienne». Ce n'est donc pas de propos délibéré que la présente étude part du nom de la déesse, mais bien par nécessité.